Réforme des collectivités et suppression de la TP : les deux sénateurs charentais lancent un appel contre la réforme
Nicole Bonnefoy et Michel Boutant encouragent les maires de la Charente à la rébellion en leur demandant de s’opposer à la réforme de la taxe professionnelle et à celle des collectivités.
[ La lettre aux 404 maires de la Charente ]
Paris, le 13 octobre 2009, Madame, Monsieur le Maire, Nous nous sommes récemment permis de vous inviter à faciliter la votation au sujet de l’avenir de la Poste. Il nous a semblé important de participer à cette action citoyenne et de rappeler les enjeux des réformes à venir pour le service public, en particulier dans les zones rurales. Les Charentais se sont déplacés en très grand nombre dans les communes qui ont organisé le vote. Plus de 17 000 de nos concitoyens ont ainsi rappelé leur attachement au service public et, plus largement, ont témoigné de leur crainte de le voir s’affaiblir, disparaître, réforme après réforme. C’est que les attaques de l’Etat sont régulières et que de fermeture de classes en suppression de tribunaux, de réforme des douanes en fusion des services décentralisés de l’Etat, chacun peut aujourd’hui constater la désagrégation du service public, pourtant absolument nécessaire dans les Départements de taille modeste, majoritairement rural comme le nôtre. Le pacte républicain est en danger. Nous sommes inquiets et souhaitons vous alerter sur le risque d’un aggravement de la situation, d’une rupture possible de ce pacte par les conséquences des réformes que le Gouvernement projette maintenant de mettre en place : – la suppression de la taxe professionnelle dans le projet de loi de finances pour 2010 – les projets de lois de réforme des collectivités territoriales Désormais c’est le service public rendu, développé par les collectivités locales, les communes, les EPCI, les Départements, les Régions, qui est en danger. Alors que dans la crise l’Etat demande aux collectivités locales d’être à la fois des amortisseurs sociaux et des investisseurs de premier rang, les projets de réformes précités visent à rogner, voire à supprimer leur capacité d’agir. Faut-il rappeler que suite aux lois de Décentralisation, les collectivités locales sont devenues les principales responsables des services publics et les principaux investisseurs publics, alors qu’elles représentent à peine 10 % de la dette publique ! Le projet de suppression de la clause générale de compétences pour les Départements et les Régions, celui de la limitation des financements croisés, des possibilités de financement par les Régions ou les Départements des projets communaux, sont la preuve de la volonté de recentralisation de l’Etat. Tout comme l’est le souhait, clairement exprimé, de donner aux Préfets des pouvoirs coercitifs en matière d’intercommunalité, de fusion de communes, ou de transfert des compétences des communes vers les métropoles et les agglomérations. Par ailleurs, les ressources financières des collectivités territoriales, avec la suppression de la taxe professionnelle, sont également les victimes des projets du gouvernement. Deux chiffres résument la situation pour les communes et les intercommunalités. Elles perçoivent actuellement 16,5 milliards d’euros de taxe professionnelle. Le produit de la nouvelle cotisation locale d’activité, basée sur les valeurs foncières, que le gouvernement souhaite mettre, à terme, en place, est évalué à seulement 5,5 milliards d’euros ! Qu’en est-il des 11 milliards d’euros de pertes fiscales pour les communes et les intercommunalités qui se trouvent privées de tout lien fiscal avec les entreprises ? C’est bien, à terme, la disparition de l’autonomie fiscale des collectivités que prévoit le projet du Gouvernement. La réforme aboutira également, en pleine crise économique, à faire basculer la charge de l’impôt économique qu’est la taxe professionnelle vers la fiscalité pesant sur les ménages charentais. En effet, les collectivités territoriales ne disposeraient à l’avenir, pour financer le service public local, que des seuls impôts « ménages ». Sans ressource dynamique, sans véritable pouvoir de décision, voilà les Communes, les Départements et les Régions de France condamnés à appliquer les politiques et programmes gouvernementaux. C’en est fini des politiques locales, des stratégies territoriales, des actions volontaristes dans le domaine de la culture, du développement économique, de l’enseignement supérieur ou encore du sport. Vous le voyez, la démarche du Gouvernement témoigne d’une véritable défiance envers les élus locaux et les collectivités territoriales qu’ils gèrent. Les projets de réforme, s’ils sont menés à terme, aboutiront à faire des élus locaux de simples agents de l’Etat. D’ailleurs, au prétexte qu’ils coûteraient trop chers, et seraient désormais inutiles, le Gouvernement souhaite supprimer la moitié des élus généraux et régionaux. Pourtant, là encore, en ce qui concerne le Conseil général, ce coût représente moins de 0,25 % du budget (compte administratif 2008). Le rôle des élus locaux auprès de nos concitoyens est irremplaçable. Faut-il rappeler que le plus grand nombre des 500 000 élus nationaux exercent leurs fonctions bénévolement, dans un environnement juridique difficile ? Pour toutes ces raisons, il nous paraît urgent de s’opposer avec fermeté aux projets présentés par le gouvernement, véritable fossoyeur de la Décentralisation. En tant qu’élu local, vous vous trouverez encore une fois en première ligne. C’est pourquoi nous vous engageons à soumettre à votre Conseil Municipal, avant de nous la retourner à l’une des deux adresses précisées en bas du recto, la délibération ci-jointe, preuve de votre attachement à une Décentralisation juste et solidaire, et de votre souhait d’une réforme ambitieuse, donnant aux collectivités locales les moyens de poursuivre et d’améliorer encore les missions au service de nos concitoyens. Recevez Madame, Monsieur le Maire, l’assurance de notre dévouement républicain et de notre haute considération pour le mandat que vous exercez. Nicole Bonnefoy et Michel Boutant |
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