L’impact des pesticides sur la santé passé au peigne fin
[ Article Sud Ouest du 12/09/13 ]
L’impact des pesticides sur la santé passé au peigne fin
Le CHU de Poitiers va analyser les cheveux de 200 viticulteurs et riverains.
![La vigne, sensible aux maladies, est une grande consommatrice de produits phytosanitaires. Photo : E.D. La vigne, sensible aux maladies, est une grande consommatrice de produits phytosanitaires.](https://www.nicole-bonnefoy.com/wp-content/uploads/2013/09/articleSO-pesticides120913.jpg)
Parce qu’elle est très sensible aux attaques du mildiou, de l’oïdium, de la flavescence dorée et de bien d’autres maladies, la vigne a toujours été une grande consommatrice de produits phytosanitaires. Au pays du cognac, les pulvérisations de pesticides sont mieux encadrées (1). Mais ont-elles vraiment diminué ? Quelles conséquences ont-elles sur la santé des viticulteurs et de tous ceux qui vivent près des vignes ? Le Centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers veut en savoir plus.
Hier après-midi, à Cognac, le professeur Éric Ben-Brik, médecin de l’Unité de consultations de pathologies professionnelles et environnementales (UCPPE), a réuni ses partenaires et évoqué les grandes lignes d’une étude inédite qui devrait se dérouler avant 2015, avec le soutien financier de la Région Poitou-Charentes. Son nom ? Phytotif. Son principe ? Analyser les cheveux de 100 viticulteurs et de 100 riverains, afin de mieux mesurer leur exposition aux pesticides. Qui ? Où ? Quand ? Comment ? Les modalités de prélèvement ne sont pas encore décidées.
Atmo Poitou-Charentes – la structure qui évalue la qualité de l’air dans notre région – sera associée à cette démarche éminemment scientifique, tout comme la Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles (Fredon) et l’association Phyto-Victimes, présidée par Paul François, ce céréalier de Bernac qui a engagé un véritable bras de fer avec le géant américain Monsanto.
Le projet Phytotif, dont les contours restent à préciser, viendra compléter une précédente étude de l’Atmo, qui a récemment pointé « des concentrations particulièrement élevées dans l’air » de Folpel, un fongicide utilisé pour traiter les maladies de la vigne, notamment la flavescence.
Entre février et décembre 2012, Atmo a installé ses capteurs à Poitiers, dans le quartier des Couronneries, mais aussi à Juillac-le-Coq, petite commune de 668 habitants au cœur du vignoble du cognac. La machine (qui prélève 1 mètre cube d’air par heure) a été posée au centre du bourg, « dans un environnement représentatif de l’exposition des populations ».
À Poitiers comme à Juillac, 25 campagnes de prélèvements d’une durée de sept jours ont été menées. Les résultats ont été publiés cet été. Le document de 52 pages « montre très nettement la prédominance de l’impact des traitements viticoles sur la présence des pesticides dans l’air à Juillac-le-Coq […], notamment les fongicides et les insecticides, dans des concentrations sensiblement supérieures à celles de Poitiers. »
Principal produit détecté à Juillac : le Folpel, dont les concentrations dépassent parfois les 65 ng/m3 entre mai et septembre. Atmo note cependant que « 2012 était une année aux conditions climatiques particulières », favorables au développement des maladies de la vigne, notamment la flavescence, contre laquelle l’État a décrété une lutte obligatoire.
Parmi les autres substances détectées à Juillac, citons le chlorpyriphos méthyl et éthyl, le cymoxanil et le pyriméthanil. Des traces de trifluraline (produit interdit depuis 2008) ont également été trouvées. Le lindane (interdit depuis 1998) est quant à lui toujours bien présent, dans des « quantités non négligeables à Juillac comme à Poitiers ». […] Article Sud Ouest
(1) En mai 2012, la station viticole du BNIC a sensibilisé les 4 700 viticulteurs des deux Charentes à l’utilisation des pesticides, en classant les produits selon trois couleurs : vert, jaune et rouge.