LGV : Des camions indésirables à Mansle
[ Article Sud Ouest du 06/01/12 ]
LGV : Des camions indésirables à Mansle
Michel Harmand, maire de la commune, ne veut pas voir les camions du chantier LGV sur sa commune. La situation se tend.
Le 1er avril , Cosea, la filiale de Vinci chargée de construire la LGV, doit mettre en service le demi-échangeur provisoire qui, au sud de Mansle, permettra aux camions de transport des matériaux de se diriger vers le centre névralgique du chantier, la base de Villognon. Si ce n’est que, pour l’heure, le maire de Mansle s’oppose au passage des poids lourds au cœur de sa commune.
Michel Harmand ne s’interdit d’ailleurs pas de formaliser, avec le Conseil municipal, une interdiction de circulation des poids lourds sur les voies communales. « Mais je ne pense pas qu’on ira jusque-là », dit-il à l’heure où s’engagent, avec Coséa, les dernières discussions, censées mettre un terme à un dossier à rebondissements.
Une rivalité tenace Il y a toujours eu de l’orage dans l’air entre Nicole Bonnefoy et Michel Harmand… Disposant d’une assise électorale sans partage jusqu’à il y a peu, le maire de Mansle, ancien vice-président du Conseil général, a été dépossédé de son siège au Département par Nicole Bonnefoy, en 2008. À l’époque, Michel Harmand ne doutait pas qu’il conserverait la place : Nicole Bonnefoy avait déjà échoué par deux fois, en 1994 et 2001 face à lui. En 2008, la victoire de cette dernière fait l’effet d’une douche froide sur le maire de Mansle. D’autant que son adversaire poursuit son ascension jusqu’au Sénat quelques mois plus tard. Aujourd’hui, Nicole Bonnefoy se demande si Michel Harmand ne commet pas « un péché d’orgueil ». Comme si le maire de Mansle voulait faire trébucher la sénatrice, à l’heure où celle-ci entend boucler, à sa manière, le dossier jamais abouti du désengorgement du centre-ville de la commune. « C’est ridicule, il n’y a pas de péché d’orgueil, juge Michel Harmand. C’est un problème de sécurité. En mai, nous avions déjà dit non à Coséa pour le passage des camions sur l’avenue Paul-Mairat. Depuis, nous n’avons jamais été associés à la réflexion, avec Coséa et le Conseil général ». |
Dans cette histoire, tout tourne autour d’une revendication : la construction d’un échangeur complet, sur la RN 10, au sud de Mansle. Du temps où la droite était aux manettes du Département, Michel Harmand l’a toujours demandée, sans succès. L’annonce du dernier PDMI (Plan de modernisation des itinéraires), où la Charente s’est taillé la part du lion avec 181 millions d’euros, n’a résolu que la moitié du problème avec la réalisation prévue d’un demi-échangeur, côté est de la RN 10…
Dix-huit mois difficiles
Pas suffisant pour Michel Harmand qui, début décembre, comptait bloquer la RN 10 pour obtenir satisfaction. La manifestation a été finalement annulée, dans l’attente d’une réunion mi-décembre, avec Coséa et le Conseil général. Car, depuis quelques mois, la sénatrice Nicole Bonnefoy planche sur une alternative : faire en sorte que le demi-échangeur provisoire (au sud de Mansle, côté ouest de la RN 10) réalisé par Coséa pour le trafic de ses camions vers la base de Villognon devienne définitif. « C’est un travail sur la durée puisque nous devions obtenir la validation technique de la Dreal. »
À Mansle, dans le prolongement de cet aménagement provisoire, les camions seront dirigés vers l’avenue Paul-Mairat pour rejoindre la RD 739 « On sait que, pendant dix-huit mois, ce sera difficile pour les riverains. Comme à Ruffec ou dans d’autres communes de Charente, d’ailleurs. Il faut bien que les camions passent quelque part… Coséa nous a donné des garanties de sécurité avec des aménagements », estime Nicole Bonnefoy.
Et, dans la foulée de la noria de camions LGV, le Conseil général propose de recalibrer l’avenue Paul-Mairat jusqu’au cimetière, « pour en faire la nouvelle RD 739, ce qui va complètement désengorger le centre-ville de Mansle, désenclaver la commune et donner des possibilités d’extension aux entreprises qui bordent cet axe ». Dans une commune où la circulation en cœur de ville est très problématique, l’argument aurait dû faire mouche, pense la sénatrice.
Un chantage selon Harmand
Ce n’est pourtant pas le sentiment de Michel Harmand qui a redit son opposition totale au projet dans un courrier adressé aux maires du canton et face aux responsables de Coséa le 20 décembre. « Jamais je ne permettrai que l’on mette en danger les riverains de l’avenue Paul-Mairat… On nous parle d’un camion toutes les trois minutes, dans les deux sens, sur un axe où se trouvent un collège de 350 élèves, une maison de retraite de 80 lits, un lotissement, les infrastructures sportives de la commune, une gare routière et un supermarché… Et puis, il n’y a pas que les camions de la LGV, il y a aussi ceux des carriers. Nous devons assurer la sécurité de la population et ne pas transformer une partie de notre ville en enfer. »
Michel Harmand n’hésite pas à qualifier la proposition de Nicole Bonnefoy de « chantage ». Et la récupération de l’avenue Paul-Mairat par le Département serait un cadeau empoisonné puisque Michel Harmand craint d’avoir à sa charge, dès lors, les portions de la RD 739 et de la RD 18 qui se croisent au centre de sa commune.
Le maire de Mansle veut une alternative. Et il propose la construction d’un itinéraire bis sur les terres agricoles du sud de Mansle. Une solution ardue à mettre en œuvre d’ici le 1er avril, ne serait-ce qu’en raison de l’éventuelle découverte de contraintes techniques et environnementales.
Un précédent projet d’échangeur, à Mansle, à hauteur même de la RD 739, avait été mis au rebut, à cause de la présence d’une fleur protégée, l’euphraise de Jaubet. […] Article Sud Ouest