Organisation d’un débat au Sénat sur la prolifération du frelon asiatique

13 février 2012 | Actualités / Sénat

[ Tribune libre de Nicole Bonnefoy du 13/02/12 ]

Organisation d’un débat au Sénat sur la prolifération du frelon asiatique

Le 8 février 2012, j’ai posé une question orale avec débat au Sénat sur la problématique de la prolifération du frelon asiatique en France. L’inscription de ce débat de 2 heures à l’ordre du jour de Notre Haute Assemblée est la conséquence de l’attitude plus que circonspecte du Gouvernement face à l’invasion de cette espèce. Pourtant, la prolifération du frelon asiatique, même si elle peut prêter à sourire dans un premier temps, est un réel problème. Tout en mettant en péril l’activité des apiculteurs et l’équilibre de notre biodiversité, elle pose de graves inquiétudes au niveau de la sécurité des particuliers qui doivent y faire face.

C’est pourquoi, depuis plus d’un an, je tente d’alarmer le Gouvernement à ce sujet afin qu’il prenne ses responsabilités en mettant en œuvre un plan d’action pour lutter contre le frelon asiatique. J’ai ainsi déposé des questions écrites et orales, avant de rédiger une proposition de loi. Or, aucune réponse concrète ne m’a jamais été apportée !

Pourtant, les dommages économiques et écologiques, ainsi que les problèmes de santé publique causés par cet envahisseur vont bientôt concerner la moitié du territoire français. Le frelon asiatique est aujourd’hui présent dans un grand nombre de nos départements métropolitains dont 44 (majoritairement dans le sud-ouest de la France) sont plus particulièrement infestés. Par modélisation, on sait désormais que cette espèce va facilement s’étendre sur toute l’Europe.

Grands prédateurs d’abeilles, qui peuvent représenter jusqu’à 80% de son bol alimentaire, le frelon asiatique inquiète le monde apicole déjà en crise depuis plus de 10 ans, en menaçant ruchers et essaims. Selon l’Union Nationale de l’Apiculture Française, les dégâts dans le sud ouest de la France sont déjà considérables. Le Syndicat Apicole de la Gironde a ainsi perdu, en trois ans, plus du tiers de ses adhérents !

En outre, ce serait une erreur de considérer le frelon asiatique comme un seul problème apicole. Son impact est bien plus vaste. En effet, en s’attaquant à ces grandes pollinisatrices que sont les abeilles, le frelon asiatique met à mal un maillon essentiel de la biodiversité. Or, de nombreuses espèces pollinisatrices sont déjà en train de disparaître au risque de rompre un équilibre naturel acquis en plusieurs milliers d’années. De plus, faut-il rappeler que 35% de la production alimentaire mondiale dépend des pollinisateurs ?!

La localisation des nids commence également à poser problèmes. Depuis 2 ans, apiculteurs et particuliers semblent observer une multiplication de nids à hauteur d’hommes, ce qui n’est pas sans générer des accidents. Sans tomber dans la psychose, nous en sommes aujourd’hui à 8 décès recensés, sûrement plus, et le nombre d’attaques se multiplie.

La pression est donc quotidienne sur les populations et pose clairement la question de la sécurité de nos concitoyens. Les apiculteurs et les services des pompiers pointent en effet du doigt la particulière agressivité et dangerosité de cette espèce lorsque nous nous trouvons à proximité des nids.

Pour l’heure, aucun plan national contre cet insecte n’a été mis en place et la lutte demeure partielle et éclatée. Les apiculteurs tentent du mieux qu’ils peuvent de soulager les ruches par un système de piégeage mais ils sont totalement livrés à eux-mêmes. En matière de destruction de nids, tout se fait à la discrétion des départements et même des particuliers. Dans le domaine public, les pompiers n’interviennent qu’en cas de danger immédiat pour la population. Sur le domaine privé, les particuliers sont soit contraints d’avoir recours à des prestataires privés dont les tarifs s’avèrent prohibitifs, soit d’entreprendre d’éliminer eux-mêmes les nids par des procédés dangereux, toxiques et polluants.

La situation ne peut donc plus durer. C’est pourquoi, lors de ce débat, j’ai tenu à formuler des propositions au Gouvernement pour lutter contre cette espèce invasive.

Ainsi, j’ai évoqué la nécessité de :

– Recenser et surveiller l’espèce, afin d’avoir une meilleure connaissance de la répartition et de la localisation des nids.

– Accélérer le travail de recherche afin de rendre les piégeages plus sélectifs, notamment par le biais de phéromones.

– Classer l’espèce en nuisible au sens du code rural, avec la reconnaissance de son impact sur les cultures végétales et, dans un but d’intérêt général, la mise en place de mesures de prévention, de surveillance et de lutte obligatoires.

– Organiser à l’échelle nationale, mais avec des déclinaisons locales, des plans d’actions de destruction des nids en confiant, par exemple, cette lutte à des organismes prévus à cet effet comme les FREDONS (Fédérations Régionales de Défense contre les Organismes Nuisibles). C’est seulement ainsi que nous donnerons une cohérence à l’action publique avec une réelle centralisation des données et un recensement des actions menées !

– Informer et sensibiliser le public sur cette espèce, afin d’éviter les accidents et de faire connaître les démarches à suivre en cas de découverte des nids. Il pourrait par exemple s’avérer nécessaire de mettre à la disposition des mairies des plaquettes d’informations pratiques et concises, à destination des particuliers. Ainsi, nous pourrions éviter des accidents en indiquant les démarches à suivre en cas de découverte d’un nid.

Malheureusement, lors de ce débat, le Gouvernement a une nouvelle fois refusé de prendre ses responsabilités, restant sourd à mes propositions, ne formulant aucune proposition concrète, aucun plan d’action de lutte contre le frelon asiatique !

Je tiens également à déplorer que, ni le Ministre d’agriculture pourtant en charge du pilotage de ce dossier, ni la Ministre de l’environnement, n’aient été présents pour me répondre. D’où ma surprise de constater que Monsieur Benoît Apparu, Secrétaire d’État au Logement, serait mon interlocuteur! Je suis sûre que le monde apicole, tout comme les élus locaux et les populations concernées, apprécieront le manque d’intérêt du Gouvernement à leurs égards !

Cette situation est des plus regrettables car il y a réellement urgence à agir. Les scientifiques nous indiquent déjà que cette espèce ne peut plus être éradiquée et qu’elle fait désormais partie de notre biodiversité. Nous devons donc tout faire pour en limiter l’impact sur nos espèces autochtones, à commencer par les abeilles.

C’est pourquoi, j’estime plus que jamais nécessaire qu’un plan national de lutte contre le frelon asiatique soit mis en œuvre afin de limiter et d’encadrer la population du frelon asiatique, tout en réduisant sa nuisance et son impact économique pour le monde apicole.

En savoir + :

Réponse écrite : Prolifération du frelon asiatique (question n° 06728)
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Question écrite avec réponse : Prolifération du frelon asiatique (n° 09570)
Note d’information : Le Conseil général vote un plan de lutte contre le frelon asiatique
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Vidéo : Question orale avec débat : Lutte contre la prolifération du frelon asiatique
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Proposition de loi tendant à créer un fonds de prévention contre la prolifération du frelon asiatique
Tribune libre : Dépôt d’une proposition de loi visant à créer un fonds de prévention contre le frelon asiatique
Vidéo : Question orale : Prolifération du frelon asiatique en Charente
Question écrite : Prolifération du frelon asiatique (n°16263)

Revue de presse :

Frelons asiatiques : déjà 936 nids détruits en Charente
Le Département en guerre contre le frelon asiatique
Nicole Bonnefoy contre les frelons asiatiques