Une avancée majeure mais encore fragile dans la lutte contre les violences conjugales
01/07/10 | Tribune libre de Nicole Bonnefoy
Une avancée majeure mais encore fragile dans la lutte contre les violences conjugales
La proposition de loi relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, a été adoptée le 24 juin au Sénat et le 29 juin dernier à l’Assemblée nationale.
Comme je vous l’avais indiqué dans ma tribune libre du 26 février dernier, je me félicite que nous ayons pu poursuivre le travail engagé en 2006 par mon collègue Roland Courteau, qui avait ouvert la voie d’une législation dans le domaine des violences conjugales.
Lors de l’examen de ce texte, je me suis réjouie que le Sénat ait retenu le titre de notre proposition de loi, et fait droit à nos demandes s’agissant de la création d’une journée nationale de sensibilisation aux violences faites aux femmes, fixée au 25 novembre.
Le Sénat a aussi accepté d’introduire des campagnes de sensibilisation, dispensées à tous les stades de la scolarité, consacrées à l’égalité entre les hommes et les femmes, à la lutte contre les préjugés sexistes et à la lutte contre les violences faites aux femmes et les violences commises au sein du couple.
Cette disposition me tenait particulièrement à cœur. Comme je l’ai rappelé plusieurs fois lors de mes interventions dans l’hémicycle, il est indispensable que les enfants soient pris en compte comme des personnes à part entière dans notre législation !
Dans le cadre des violences familiales, ils doivent pouvoir bénéficier, dès le plus jeune âge, de campagnes de prévention et de sensibilisation en milieu scolaire. Je pense que les valeurs de respect et d’égalité entre les sexes doivent être inculquées dès les bancs de l’école. En effet, aucune mesure de répression ne changera les choses si les mentalités, elles, n’évoluent pas !
D’une manière générale, parmi les mesures les plus innovantes de cette loi, nous pouvons noter : • la reconnaissance du délit de « violence psychologique » • la mise en place d’une « ordonnance de protection » pour les victimes • la création d’un contrôle par un placement sous surveillance électronique mobile des auteurs de violences |
Cependant, je regrette fortement que certaines de nos propositions n’aient pas été retenues. Je pense, par exemple, à la création au sein de chaque tribunal de grande instance d’une « antenne de psychiatrie et de psychologie légales », ou encore la mise en place d’une formation initiale et continue pour les personnels médicaux et paramédicaux, les travailleurs sociaux, les magistrats et les personnels de la police et de la gendarmerie nationale ainsi que les avocats visant à leur permettre de détecter les violences, de les prévenir et de guider les victimes.
Pourtant, il est évident que ces dispositions auraient permis une avancée supplémentaire dans la détection, le soutien et la prise en charge des victimes de violences conjugales.
De plus, je tiens à rappeler que le Gouvernement a fait de la lutte contre les violences faites aux femmes, une « Grande cause nationale » pour 2010.
Or, excepté ces deux textes issus de nos travaux, aucune mesure d’envergure nationale n’a pour l’instant été menée par le Gouvernement. La situation semble même se dégrader. En effet, lors des auditions organisées en préalable de l’examen de cette loi, de nombreuses associations nous ont fait part de leurs difficultés croissantes à poursuivre leurs missions d’accompagnement et de soutien aux victimes, du fait d’un manque de moyens financiers et matériels.
Il reste donc encore beaucoup de chemin à parcourir mais, dans un premier temps, je crois que nous devons nous féliciter de ce nouveau pas en avant dans le domaine de la lutte contre les violences conjugales.
Toutefois, je resterai, avec l’ensemble de mes collègues socialistes, très vigilante sur l’application effective de cette loi et sur les moyens qui seront dégagés pour sa mise en œuvre.