« Un signe d’espoir » pour Nicolas Hulot
01/12/14 | Article Sud Ouest
« Un signe d’espoir » pour Nicolas Hulot
Nicolas Hulot a remis samedi la Légion d’honneur à Paul François qui a annoncé vouloir convertir, en 2015, 40 % de son exploitation en agriculture biologique.
« A travers cette médaille, nous reconnaissons le parcours et la détermination d’un homme. Nous reconnaissons aussi les petites et grandes souffrances, toutes ces tragédies silencieuses qu’il a fallu tant de temps pour reconnaître. » Samedi midi dans la salle des fêtes comble de Salles-de-Villefagnan, Nicolas Hulot a remis la Légion d’honneur à Paul François.
Une « distinction qui fait sens » dix ans après l’intoxication du céréalier charentais par un herbicide et quatre ans après la création de l’association Phyto-Victimes qui vient en aide aux victimes des pesticides et à leurs familles.
« Une civilisation n’est pas une société qui sacrifie l’avenir au présent. Je veux voir le signe d’espoir que nous avons basculé dans un siècle où l’homme, la nature, les urbains, les ruraux sont réconciliés autour de ce qui les rassemble », a poursuivi l’animateur écologiste nommé en 2012 par François Hollande « envoyé spécial du président de la République pour la protection de la planète. »
Ému, Paul François a salué « ceux qui ne sont plus là aujourd’hui, ceux qui sont décédés à cause de l’utilisation de la chimie en agriculture intensive. »
Procès en appel en mai
Il a également remercié les « lanceurs d’alertes, ces médecins et scientifiques qui cherchent la vérité. Il n’est pas utopique aujourd’hui d’espérer une agriculture qui n’entraîne plus de dégâts sur la santé des agriculteurs et sur l’environnement et donc sur les consommateurs. Cette médaille va nous aider à continuer notre combat. » Le parcours de Paul François est celui, banal, de milliers d’autres exploitants agricoles. Devenu agriculteur par « défaut », il a repris l’exploitation familiale en 1987. « Dans les années 80, la chimie apportait les solutions à tous nos problèmes. Elle sécurisait les rendements et nos revenus. On faisait une confiance aveugle aux vendeurs de produits et aux molécules qu’on aurait pu boire. » Jusqu’au printemps 2004 quand le céréalier de Bernac est intoxiqué en nettoyant une cuve au Lasso, un herbicide vendu par Monsanto. Depuis, il souffre de problèmes neurologiques qui l’envoient régulièrement à l’hôpital et l’obligent à travailler à mi-temps.
Parce que la « chimie mortifère n’a plus sa place en agriculture », le Charentais a décidé d’attaquer le géant américain devant les tribunaux.
D’abord pour faire reconnaître son invalidité comme maladie professionnelle, en 2008, puis pour faire condamner la responsabilité de la firme. Ce qu’a fait le tribunal correctionnel de Lyon en 2012. L’appel interjeté par Monsanto sera étudié le 28 mai, toujours dans le Rhône.
« Agriculteurs formatés »
Environ 40 % des cultures qui lèveront alors dans les champs de Paul François à proximité de zones habitées n’auront reçu aucun traitement. « J’ai décidé de convertir une partie de mon exploitation en 2015 », a-t-il annoncé samedi. « J’y réfléchis depuis deux ans. C’est une décision qui n’a pas été simple à prendre. Le changement de pratique est un bouleversement pour des agriculteurs, qui, comme moi, ont été formatés. Grâce à mon associé, à ma coopérative et ses techniciens, je vais essayer. Si la bio est une des solutions, elle n’est pas forcément applicable à tous les agriculteurs. De mon côté, j’avais du mal à demander à mon employé de traiter près des riverains et de lui dire que les produits étaient sans danger », avoue l’agriculteur. Dans la salle, exploitants conventionnels ou en bio ont tous applaudi. […] Article Sud Ouest