Nicole Bonnefoy : « je garde les pieds sur terre »

20 octobre 2009 | Non classé
Nicole Bonnefoy
Nicole Bonnefoy: «Michel Boutant et moi, on ne cherche pas à briller, on fait simplement notre boulot» • photo Majid Bouzzit

Article Charente Libre du 20/10/09 ♦ Auteur : Thierry Cordeboeuf

Coup sur coup, à la surprise générale, elle a été élue conseillère générale du canton de Mansle et sénatrice de la Charente. Elue locale et nationale en même temps. Pour fêter le premier anniversaire de ce double succès, Nicole Bonnefoy vient d’entamer une série de réunions publiques (lire encadré). Comme son ancien compagnon, le député Jérôme Lambert, la sénatrice tient une comptabilité pointilleuse de ses actions électives: depuis janvier, elle a fait 272 interventions pour des particuliers, soutenu des projets dans 161 collectivités, rencontré 93 maires. Très active, très présente, toujours «nature», l’élue socialiste vient aussi de densifier et rajeunir son site internet où elle raconte méticuleusement, avec de multiples photos et vidéos, sa vie d’élue à double casquette. Rurale à fond, mais moderne quand même, et plus que jamais fonceuse.

Sénatrice, Conseillère générale: si vous ne deviez conserver qu’un seul de ces mandats?

Nicole Bonnefoy. Heureusement que je n’ai pas à choisir, ce serait terrible! Mon mandat local nourrit mon mandat national. On parle de cumul en ce moment, mais avoir un ancrage local permet de mieux comprendre la réalité des politiques et de ne pas se déconnecter du terrain. Au Sénat, je suis dans la pensée politique, au Département, je suis dans l’action. Par exemple, cette semaine, j’ai interpellé le ministre de l’Ecologie sur les problèmes que pose la carrière de l’Affit, à Roumazières. Même au Sénat, je garde les pieds sur terre. Mon pari, c’est d’être à la fois un bon législateur et un bon élu local.

Développer le chanvre en pays ruffécois était un de vos dadas à la Région. Où en est-on?

N. B. ça avance, mais pas assez vite à mon goût. Dans le Béarn, une filière chanvre est en train de s’organiser. Ils sont en train de faire ce sur quoi on travaille depuis cinq ans. Il faut aboutir avant que d’autres le fassent à notre place. La semaine dernière, j’ai rencontré le président de la chambre d’agriculture sur ce dossier. Les agriculteurs doivent s’engager à cultiver le chanvre. Quand nous aurons la garantie d’approvisionnement, nous pourrons créer une usine de transformation, sous la forme d’une société coopérative d’intérêt collectif. Les industriels pourront alors s’approprier la matière. Il s’agit d’une affaire très complexe, une véritable révolution, avec de réels débouchés. J’ai bon espoir d’aboutir enfin.

L’éducation nutritionnelle était votre autre dossier favori à la Région. Vous impliquez-vous encore et de quelle manière?

N. B. Je continue à m’impliquer dans le cadre du pays ruffécois où je siège en tant que conseillère générale. Ce programme d’éducation nutritionnelle concerne maintenant une trentaine d’écoles du Ruffécois. J’ai participé à son élaboration et j’ai même apporté une aide financière parlementaire pour l’acquisition de matériel gymnique. Au Sénat, je participe aux groupes d’études «agriculture et alimentation» et «fruits et légumes». Je suis aussi membre du club de la table française où je parle régulièrement de nos expériences ruffécoises. Je sensibilise aussi sur les difficultés qu’ont les collectivités pour faire entrer les produits locaux dans les cantines. Les contraintes administratives sont lourdes et décourageantes. Il faut les simplifier. Avec d’autres parlementaires, on y travaille et on espère bien modifier les choses. Sur ce dossier, je ne lâche rien, au contraire.

Et sur la crise du lait?

N. B. J’ai rencontré les producteurs du Ruffécois pour leur dire: mettons en œuvre des circuits courts pour que les enfants, par exemple, qui ne connaissent que les bricks de supermarché, puissent déguster du lait frais. Avec le pays ruffécois, on réfléchit à une organisation de vente des produits locaux en circuit court.

La pression s’accentue sur l’hôpital de Ruffec pour qu’il renonce à sa chirurgie 24h/24. Quelle est votre position?

N. B. J’ai écrit à Roselyne Bachelot, la ministre de la Santé pour l’inviter à reprendre le dossier. Si elle ne répond pas rapidement, j’irai la voir directement. Il faut absolument renouer le dialogue entre l’Agence régionale de l’hospitalisation et le conseil d’administration de l’hôpital, sortir du blocage actuel. On ne peut pas avancer dans un climat aussi malsain. Sur la chirurgie, j’en reste au rapport Bergeron commandé par la Région. Il démontrait la nécessité de maintenir un service de chirurgie à Ruffec. Mais la ville n’échappe pas à la volonté du gouvernement d’économiser sur la santé alors qu’il est évident qu’un hôpital de proximité se justifie sur ce territoire. Cependant, on n’est pas obtus, on peut entendre des choses, mais dans un vrai dialogue.

Vous êtes l’élue du canton de Mansle. Quel est, à votre avis, le dossier prioritaire de ce territoire?

N. B. Le dossier phare du canton qu’il faut faire enfin aboutir, c’est celui du domaine d’Echoisy. C’est un site remarquable dans lequel la communauté de communes du pays manslois a englouti beaucoup d’argent public pour pas grand-chose. Si je peux apporter ma pierre dans cette affaire, je le ferai volontiers.

Vous avez démissionné de la Région pour raison de cumul. Vous impliquerez-vous dans la campagne en mars prochain?

N. B. Bien sûr. J’ai beaucoup aimé ce que l’on a réalisé à la Région même si mes relations avec Ségolène n’ont pas toujours été faciles. Je vais m’impliquer dans la campagne car on a un bon bilan à défendre, même si je ne serai évidemment pas candidate

Après les régionales, les législatives. Etes-vous tentée par l’Assemblée nationale?

N. B. Non, je n’y pense pas. Mais je n’avais pas pensé devenir conseillère régionale, pas pensé emporter le canton de Mansle, encore moins pensé devenir sénatrice. Donc, le matin quand je me lève, je pense plutôt au travail qui m’attend dans la journée, pas aux législatives. D’ailleurs, Jérôme Lambert est un excellent député, et j’aime bien le Sénat.

Pourtant, il paraît qu’on y roupille, au Sénat, ce qui ne vous ressemble pas.

N. B. Au début, j’étais très inquiète. On me disait: «Toi, la passionnée, que vas-tu faire dans cette maison de retraite?» Et bien j’aime bien le Sénat. On y croise tous les territoires avec leurs parfums, leurs accents. Chaque sénateur vient avec sa terre collée aux chaussures. C’est une grande famille où l’on se respecte, où on s’écoute, où l’on débat en profondeur, sereinement. Pour une nouvelle comme moi, on sent comme une protection, un soutien, des encouragements. Oui, je m’y sens bien, et je suis heureuse de partager cette aventure avec Michel Boutant. On est très différents tous les deux, mais on se complète. C’est appréciable de travailler avec quelqu’un sans esprit de compétition. Michel et moi, on ne cherche pas à briller, on fait simplement notre boulot.