Partage de l’eau : sortons par le haut !

6 septembre 2023 | Actualités / Charente

« La meilleure bassine est celle que nous avons sous les pieds ! ». C’est avec ces mots que l’actuel
Président de l’Office français de la biodiversité lors d’une audition au Sénat, le 24 mai 2023, résumait de
manière lapidaire son avis sur la prolifération de ce modèle d’irrigation. Je souscris pleinement aux sages
propos de M. Olivier Thibault qui rejoint les conclusions de l’ensemble de la communauté scientifique.


En effet, pour lutter efficacement contre les sécheresses imposées par le changement climatique,
l’eau doit demeurer le plus possible dans les sols !
La création de « bassines » n’est pas neutre pour
l’environnement car elle imperméabilise les sols, contribue à l’évaporation et in fine aggrave la raréfaction de
la ressource dans les nappes et les cours d’eau. Bien sûr, il ne s’agit pas d’interdire tout ouvrage d’irrigation
mais ne faisons pas l’économie d’un vrai débat sur l’eau qui est notre bien commun.

En avril dernier, je prenais publiquement la parole à ce sujet (Lien vers la tribune du 03 avril 2023). J’appelais
à la mesure et au dialogue territorial car le manque d’eau est un fait et va durer. Il faut donc s’adapter et
enclencher une véritable transition agro-écologique
. Notre besoin en matière de planification n’a jamais
été aussi nécessaire. Celle-ci doit être partagée, concertée sous l’égide des collectivités locales et au plus
proche des territoires et des citoyens. La mise en place de réserves d’eau pourrait s’envisager
uniquement si l’ensemble des solutions fondées sur la nature (renaturation des cours d’eau,
préservation ou recréation des zones humides, plantation de haies et d’arbres, adaptation des
cultures…) ont été tentées ou expérimentées.


Le 17 juillet, la Cour des Comptes publiait un avis dans le même sens : réduction des prélèvements d’eau
« désormais incontournable », planification insuffisante, connaissances lacunaires des autorisations de
prélèvement, insuffisance des études d’impact environnemental, des solutions fondées sur la nature trop
peu exploitées, participation insuffisante des citoyens..
.


L’utilisation de l’eau est un choix éminemment politique. C’est un choix qui doit s’inscrire dans un processus
de concertation locale, dans un cadre clairement défini par le national, éclairé par des études précises, et
enfin négocié. Le retour à une décision locale et démocratique contribuerait à la responsabilisation
des acteurs dans l’usage de la ressource, à la compréhension des projets ainsi qu’à l’apaisement
général.


Force est de constater que nous en sommes très loin ! On voit aujourd’hui des projets en bataille aussi
démesurés que court-termistes sortir de terre. Ainsi, dans les Deux-Sèvres, certains entrepreneurs agricoles
préfèrent accélérer sans attendre les expertises : la précipitation n’est jamais bonne conseillère. Elle témoigne d’un
emballement qui doit nous interroger sur la mal-adaptation au réchauffement climatique et son coût pour les
générations futures.


Le manque de courage écologique du gouvernement est ici patent. En faisant croire à nos agriculteurs
qu’il n’y a rien à changer, nous nous condamnons à l’inaction et à l’incompréhension des citoyens.


A contrario d’un laisser-faire actuel inacceptable, le politique doit tracer un chemin pour l’adaptation en
accompagnant puissamment nos agriculteurs, techniquement et financièrement dans la transition.
Notre
avenir agricole et alimentaire mérite mieux que les errements actuels. Posons un principe simple dans le cadre
des futures négociations de l’usage de l’eau : le bien commun l’emporte sur des intérêts particuliers. La puissance
publique est donc légitime à imposer des conditions écologiques à son accès. L’eau doit ainsi devenir le levier
du changement de nos pratiques culturales et de notre modèle agricole et non un énième terrain de
conflits.