Proposition de loi sur la sécurité globale : pour moi et le groupe Socialiste auquel j’appartiens, c’est toujours non !

19 mars 2021 | Actualités / Sénat

En effet, nous nous sommes opposés sans état d’âme à la proposition de loi relative à la sécurité globale. Le texte adopté par la majorité de droite sénatoriale, dans ce qu’il contient et surtout dans ce qu’il ne contient pas, n’assurera pas une meilleure sécurité aux Français et ne favorisera en rien le rétablissement de la confiance des citoyens dans les forces de sécurité. En dépit de quelques tentatives visant à améliorer la rédaction des dispositions les plus préjudiciables aux libertés publiques, le Sénat n’a pas réussi à colmater les failles d’un texte hétéroclite et mal ficelé. La majorité sénatoriale a accentué les défauts de la version adoptée par l’Assemblée nationale pour en faire un produit d’appel pour les prochaines échéances électorales.

Ce texte reste porteur de nombreuses dérives.
L’expérimentation visant à donner aux policiers municipaux des compétences de police judiciaire étendues, conduit à remplacer la complémentarité des forces et engendrer une confusion entre les forces de sécurité municipales et les services de l’Etat concourant à sécurité intérieure et à la défense nationale. De ce fait, les inégalités en matière de sécurité publique entre les communes ayant les moyens financiers de se doter d’une police municipale et les autres en seront aggravées.

Les principales mesures visant à sécuriser les forces de l’ordre apparaissent contreproductives (art. 23), superfétatoires (art. 24) ou inadéquates (art. 25). En particulier, le remplacement de l’obligation de floutage du visage des policiers et gendarmes par la création du délit de provocation à l’identification suscite toujours des interrogations sur son applicabilité et son utilité, notamment au regard de son articulation inaboutie avec l’article 18 du projet de loi confortant le respect des principes de la République.

Par ailleurs, toutes les dispositions intéressant la captation des images, l’usage des caméras-piétons, les drones et les caméras embarquées ne prennent pas assez en considération le saut d’échelle technologique qu’offrent ces outils en matière de surveillance de masse. On ne peut pas se contenter d’introduire de tels dispositifs dans le droit commun au travers d’un véhicule législatif inadapté, sans avoir réalisé au préalable une expertise contradictoire, engagé une réflexion éthique et assuré un débat public et démocratique.

En matière d’encadrement du secteur de la sécurité privée, le Sénat a introduit des assouplissements regrettables, notamment sur les possibilités de recours à la sous-traitance qui sont en contradiction avec l’objectif de moralisation de ce secteur et dont les effets négatifs sont connus : déresponsabilisation du donneur d’ordre, nivellement par le bas des prix des prestations, précarisation des agents souvent d’origine étrangère.

Il y a fort à parier que : « Nous aurons à la fin, des inégalités territoriales et une forme d’illisibilité pour les citoyens dans l’accès aux services publics de sécurité […]. Parce que nous avons une très haute idée de la Police nationale et des forces de sécurité intérieure, nous voulons une police de la République forte au niveau national et respectueuse des libertés publiques. »

Enfin, il manque à ce texte des volets essentiels tels que la réforme de l’inspection générale de la police nationale (IGPN), la remise à plat du schéma national du maintien de l’ordre, l’interdiction de l’usage des LBD, les moyens de lutter contre les contrôles d’identité abusifs et discriminatoires…autant de sujets qui auraient permis assurément de restaurer le lien de confiance entre la population et les forces de sécurité. C’est l’objectif qu’il convient de privilégier en ce qu’il est un facteur de cohésion sociale et nationale.