Courrier aux Maires de la Charente – Lutte contre les agressions commises contre les élus

22 novembre 2022 | Actualités / Sénat

Madame la Maire,
Monsieur le Maire,

Les élus locaux, et plus que tout autre, les maires, sont la cible d’agressions verbales et physiques de plus en plus récurrentes. Les violences commises à l’encontre des élus locaux, qui étaient il y a peu exceptionnelles, s’intensifient d’années en années, par leur nombre mais aussi par leur gravité.

Selon les chiffres du ministère de l’intérieur, ce sont 1.186 élus qui ont été pris pour cible dans les onze premiers mois de 2021, parmi lesquels 605 maires ou adjoints victimes d’agressions physiques, soit une hausse de 47 % par rapport à 2020. Sur la même période ce sont 419 outrages qui ont également été recensés (+ 30 %).

Ces comportements inacceptables à l’encontre de celles et ceux qui donnent de leur temps à la collectivité sont une atteinte insupportable à la démocratie.

Ils appellent une réponse pénale, ferme, efficace et rapide.

Malheureusement, force est constater que beaucoup d’élus locaux renoncent à porter plainte par manque de temps et de soutien.

Les élus doivent être mieux soutenus, tout au long de la procédure, pour que justice leur soit rendue.

À l’initiative de mes prédécesseurs sénatrices et sénateurs du groupe socialiste, depuis la loi du 15 juin 2000 renforçant les droits des victimes, les associations départementales affiliées à l’Association des Maires de France (AMF) peuvent, en cas d’agression commise contre un élu et avec l’accord de ce dernier, se constituer partie civile pour l’accompagner pendant la procédure.

Depuis vingt ans, ces associations départementales, par leur expertise juridique et les ressources qu’elles peuvent mobiliser pour les frais d’avocat et de procédure, apportent un appui indispensable aux élus victimes.

La recrudescence des violences imposait de renforcer l’accompagnement juridique apportée aux élus locaux.

C’est le sens de la proposition de loi que le Sénat a adopté mardi 15 novembre dernier.

Désormais, en plus de l’association départementale affiliée à l’AMF, les associations nationales pourront également se porter partie civile au côté d’un élu victime d’agressions, de violences ou de menaces.

L’AMF, elle-même bien entendu, mais aussi sur ma proposition, toutes les associations nationales, dès lors qu’elles sont reconnue d’utilité publique ou régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans.

Ainsi, l’AMRF (Association des maires ruraux de France), l’APVF (Association des petites villes de France), l’association Villes et banlieue, et toutes les associations nationales d’élus remplissant ses conditions, pourront demain accompagner les élus locaux en se constituant partie civile à leurs côtés.

Il me paraissait essentiel qu’un élu puisse recourir à l’association qui lui parait la plus adapté à défendre ses intérêts, que ce soit en raison des liens qu’il a noué avec ses représentants départementaux ou en raison des spécificités de son territoire.

J’ai également proposé que la liste des infractions qui autorisent ces associations à se porter partie civile aux côtés d’un élu soit revue et élargie. Ainsi j’ai proposé un amendement qui prend en compte les actes d’intimidation, le cas de harcèlement, ainsi que les violations de domicile car il n’est plus rare désormais que les élus soient pris pour cible chez eux.

Par ailleurs, parce que nous gardons tous en mémoire la mort tragique et révoltante du maire de Signes (Var) décédé dans l’exercice de ses fonctions, renversé par une camionnette alors qu’il venait empêcher un dépôt sauvage de gravats, j’ai proposé qu’en de pareilles circonstances où la victime est décédée, une association puisse également se porter partie civile avec l’accord de ses ayants-droits.

Ces deux amendements ont été largement approuvés par le Sénat qui, sur cette base, a élargi la liste des infractions autorisant la constitution de partie civile des associations à l’ensemble des délits et des crimes, ce dont je me réjouis.

Enfin, le Sénat a autorisé la constitution de partie civile des associations lorsque l’agression est commise contre un membre de la famille de l’élu (son conjoint, concubin, pacsé, ainsi que ses parents ou enfants) dès lors que l’agression a été commise en raison des fonctions exercées par l’élu ou de son mandat. C’est un progrès qui me parait essentiel car le nombre de victimes est souvent plus important que le nombre d’agressions, car on dénombre de plus en plus de cas où l’entourage de l’élu est également pris pour cible.

En renforçant les possibilités d’accompagnement des élus locaux qui sont victimes d’agression, je crois que le Sénat fait véritablement œuvre utile. Je souhaite que ce texte soit rapidement examiné par l’Assemblée Nationale et adopté dans des délais que j’espère le plus brefs possibles.

Reste que la lutte contre les agressions des élus appelle une mobilisation de l’ensemble des pouvoirs publics, et au premier rang, du gouvernement et de l’institution judiciaire.

Si nombre d’élus renoncent à porter plainte c’est aussi parce qu’ils constatent que la réponse pénale n’est pas au rendez-vous, que les poursuites ne sont pas systématiques et que les condamnations restent rares.

Le gouvernement, par une circulaire du 15 décembre 2020, a souhaité réaffirmer l’importance d’une politique pénale rapide et ferme et d’un suivi juridique renforcé au service des élus. Elle peine encore à pleinement produire ses effets même si de premiers indicateurs semblent démontrer une augmentation des poursuites engagées. Il reste néanmoins encore des progrès à accomplir, tout au long de la chaine pénale. Surtout, ces efforts doivent se poursuivre dans la durée.

Soyez assurés, Madame la maire, Monsieur le maire, de ma totale détermination à faire avancer la lutte contre les violences commises contre les élus locaux.  Si de tels comportements étaient constatés, et si vous considérez que mon soutien et mes conseils peuvent être utiles, n’hésitez pas à me contacter, moi-même ou mes équipes. Je me trouverai toujours aux côtés de celles et ceux qui s’engagent et agissent pour améliorer la vie du plus grand nombre.

                                                             Nicole BONNEFOY